La conférence de la Sustainable Tuna Association (STA), qui s’est tenue ce mardi 28 mars 2023, a appelé les membres de la Commission des thons de l’océan Indien (CTOI) à une collaboration plus étroite, en vue de la réunion annuelle qui se tiendra à Maurice en mai prochain. Sur fond des récentes réunions de la CTOI marquées par la discorde, la STA a utilisé sa plateforme pour rappeler à tous les pays de la CTOI que la durabilité à long terme des stocks de thon et des économies dépendant des produits de la mer, pour toutes les parties prenantes de l'océan Indien, nécessite le rejet de la politique de division. « Nous sommes tous partie prenante du problème des uns des autres, mais nous en détenons tous aussi la solution », a déclaré Cougen Purseraman, président de la STA.
Retour sur la CTOI
Les stocks de thon de l’océan Indien ne sont pas en bonne condition. L'albacore (Yellowfin) et le thon obèse (Bigeye) sont classés dans la catégorie rouge, ce qui signifie qu'ils sont surexploités et font l'objet d'une surpêche – tandis que le thon listao a récemment fait l'objet de captures importantes alors qu’une réévaluation des stocks aura lieu plus tard dans l'année. La résolution de la CTOI visant à réduire les captures d’albacore en 2021 a été respectée par de nombreux pays tandis que d’autres s’y sont opposés et ont continué à capturer des quantités sans restriction.
Lors d’une session extraordinaire au Kenya en février de cette année, une proposition sur les dispositifs dérivants de concentration de poissons (en anglais : dFAD) a été votée dans des circonstances inhabituelles : le principal protagoniste de la proposition ayant retiré celle-ci, le matin même de l’ouverture de la réunion. Proposition qui fut, par la suite, reprise par un autre pays. Depuis cette réunion, différents pays ont officiellement objecté à la proposition, ce qui pourrait finalement conduire à l’annulation du vote.
« Confus ? Vous devriez l’être », a déclaré M. Purseramen lors de l’événement, ajoutant « le manque de concertation entre les pays, entre les réunions officielles, ajoute à la division et j’espère que notre conférence d’aujourd’hui pourra aider à rapprocher certaines parties. Il n’y a rien de fondamentalement répréhensible à être en désaccord sur les niveaux de capture ou les méthodes de pêche au thon, mais il n’en reste pas moins que, pendant que les politiciens se disputent ici sur le terrain, sous l’eau, il y a un vrai problème qui nous menace tous de la même manière, que vous soyez un grand bateau approvisionnant les conserveries desservant les marchés de l’UE ou un pêcheur à la ligne qui approvisionne votre marché intérieur local ». Lors de la conférence, la STA a voulu accroître les niveaux d’empathie et de compréhension de la position de chacun et à se concentrer sur l’objectif commun : des stocks durables, à long terme, pour tous.
Un enjeu d’intérêt mondial
La conférence de la STA a vu des intervenants de divers gouvernements et de l’industrie de la pêche partager leurs points de vue. Le discours d’ouverture de M. Sardar Satrajit, chef de mission adjoint à l’ambassade des États-Unis à Maurice et aux Seychelles, a souligné l’attention mondiale portée à l’océan Indien et l’importance d’avoir un océan qui soit durable. IBL et Princes, les cofondateurs de la STA et les piliers de l'économie mauricienne des produits de la mer, ont également pris la parole.
Plusieurs orateurs sont aussi intervenus lors de la conférence, parmi, M. Chris O'Brien, secrétaire général de la CTOI et Mme Susan Jackson, présidente de l’International Seafood Sustainability Foundation. Cette dernière était présente sur l’invitation de l’ambassade des États-Unis à Maurice.
« Il était particulièrement important que nous entendions le plus grand nombre de voix possible lors de cet événement. Les obstacles doivent être éliminés et la compréhension mutuelle améliorée. Nous pensons que la division créée au cours des dernières années n’est pas seulement inutile, mais qu’il s’agit en fait d’un faux sentiment de division. Il n'existe pas de voix unique qui représente tous les petits États insulaires en développement ou les pays côtiers, pas plus qu'il n'existe de voix unique qui représente les pays de pêche en eaux lointaines tels que l’UE. Nous sommes une industrie et un monde beaucoup plus interconnectés que ces opinions étroites voudraient faire croire », a ajouté M. Purseramen.
La conférence s'est terminée par une table ronde avec des représentants des ministères régionaux et internationaux de la pêche et de l'industrie, dont le Kenya, Oman, l'île Maurice et l'UE. Le ministre de la Pêche et de l’Economie Bleue de Madagascar, Dr T. Paubert Mahatante, est intervenu et a partagé son point de vue sur les différentes mesures adoptées pour reconstituer les stocks d'albacore et sur l'impact qu'elles ont sur le développement de ce segment de l'économie malgache.
La réunion annuelle de la CTOI en mai 2023 à Maurice
Lors de la 27ème session de la CTOI à Maurice, la question de l’Albacore (Yellowfin) sera à nouveau le sujet de discussion le plus important, tout en notant que depuis la dernière réunion, le thon obèse (Big Eye) est également passé au rouge. Les différents marchés et les enseignes du monde entier suivront attentivement les événements qui se dérouleront à Maurice et se demanderont si c’est au cours de cette session que des accords seront enfin conclus, acceptés par tous et équitables pour tous.
« Nous lançons un appel à tous les États membres de la CTOI pour qu’ils reviennent à la raison et qu'ils renouent avec l’esprit de collaboration et de consensus qui devrait prévaloir au sein de la Commission. Que cela nous plaise ou non, notre avenir est étroitement lié et ce n’est qu’en acceptant de faire des compromis et de collaborer que nous atteindrons notre objectif ultime : la reconstitution des stocks. La situation est grave pour tout le monde et pas seulement pour un segment de la pêche. Recommençons à zéro et formulons des propositions qui engloberont tous les engins de pêche et créeront des conditions équitables pour tous. Chacun a un effort proportionnel à faire, alors mettons enfin de côté nos différences et faisons en sorte que la prochaine Commission de la CTOI à Maurice soit couronnée de succès », a ajouté Purseramen.